Bien qu’il ait choisi d’être acteur, Bo Geom ne restait jamais loin de la musique. Il l’aimait depuis son plus jeune âge et il pouvait même en faire régulièrement. Il ne s’arrêtait pas à simplement chanter sous sa douche, il avait la chance de pouvoir chanter juste et de pouvoir s’accompagner au piano. Bien sûr, ses fans adoraient ça et il lui arrivait souvent d’être accompagné de l’instrument lors de ses meetings. Il estimait être chanceux, parce qu’il pouvait pratiquer ses passions, même s’il n’avait pas trop de temps. Et puis les fans étaient toujours heureux de pouvoir le voir et l’entendre. Le jeune homme en profitait donc assez souvent et avait même eu la chance de pouvoir sortir un album sur lequel il avait travaillé.

Ce soir-là, il n’était pas particulièrement triste ou stressé. Il avait juste envie d’un petit moment avec un piano, pour pouvoir se détendre et partir sur une bonne journée le lendemain. Il avait donc prévenu Ye In de son absence, histoire qu’il ne le cherche pas partout dans l’école parce qu’il ne le trouvait pas dans le loft. Bo Geom s’était simplement rendu dans la salle de musique après avoir mangé un petit truc qu’il avait préparé la veille. Il s’était installé devant le piano et désormais il jouait un morceau qu’il n’avait pas joué depuis bien longtemps. L’un des premiers qu’il avait appris avec sa mère. Quand c’était comme ça, il avait souvent l’impression qu’elle était près de lui, à l’écouter jouer en souriant. Ça ne le rendait pas triste, ça l’apaisait.

Seulement, quelque chose vint briser sa bulle. Il ne l’entendit pas au départ, trop concentré sur les touches sous ses doigts. Il ne fit pas attention à la porte qui s’ouvrit derrière lui, se refermant juste après. Il ne remarqua pas qu’une autre personne se trouvait dans la pièce avec lui, jusqu’à ce que cette personne s'assoit à côté de lui. Il tourna donc la tête pour voir qui c’était et avala sa salive en la reconnaissant. Il n’avait absolument pas envie de parler à la jeune femme et si elle s’était installé à côté de lui, ce n’était pas par hasard. Au départ, il comptait l’ignorer et continuer à jouer mais il s’arrêta quand elle commença à lui parler. Il ne voulait pas la regarder. Il ne voulait même pas l’écouter mais à part s’enfuir -ce qui n’était pas une option- il n’avait aucun moyen d’y échapper. Les mains sur les genoux, il écouta donc sagement ce qu’elle disait, le regard droit devant lui pour ne pas donner trop d’attention à une personne qui de toute façon n’en voulait pas.

L’acteur était malheureusement tombé sous le charme de la médiatrice de l’école. Il l’avait rencontré pour une émission et s’était laissé avoir par son jeu d’acteur. Néanmoins, il était persuadée qu’elle n’avait pas pu faire semblant à 100% et qu’il existait du bon en elle. Il le sentait, elle n’était pas aussi terrible qu’elle le montrait. Il suffisait juste de gratter un peu la surface. Il lui avait offert des fleurs, les déposant d’abord pour se faire voir. Tous les jours, elle les jetait et ça ne le décourageait pas. Seulement, un jour il avait retrouvé les fleurs de la veille dans un vase, ce qui lui avait donné un peu d’espoir. Il avait donc pris son courage à deux mains pour lui offrir un bouquet à visage découvert. Ce jour-là, il avait compris qu’elle s’était jouée de lui et qu’elle n’avait aucun intérêt pour la personne qu’il était. Il avait donc simplement décidé d’arrêter avant de se faire du mal. Et là, elle était à côté de lui pour le lui reprocher.

La colère monta. Il n’était pas du genre à s’énerver, ça ne lui arrivait que très rarement. Il fallait le pousser à bout et c’était ce qu’elle était en train de faire. Déjà, parce qu’elle avait touché son égo en jouant avec lui mais aussi parce qu’elle se trompait à son sujet. Elle n’aimait pas les pantins qu’on pouvait manipuler à sa guise mais en même temps, elle ne voulait pas qu’il prenne la décision d’arrêter de lui courir après. Elle croyait pouvoir imposer les règles ? Peut-être qu’elle en avait l’intention mais il ne voulait pas se laisser faire pour autant. Elle le voyait comme un crétin qui n’avait pas cherché plus loin que sa beauté. Ça le blessait qu’elle le réduise à ça. Ça le mettait en colère aussi. Si elle voulait s’amuser à ça, il n’allait pas se contenter de sourire comme l’idiot qu’elle pensait avoir à côté d’elle. Il attendit sagement qu’elle ait terminé de parler pour se tourner vers elle. Bien qu’il était en colère, il ne comptait pas élever la voix pour autant.

- Ça y est, vous avez fini votre caprice ?

Il allait attirer ses foudres, il en était certain, mais c’était comme ça qu’il le percevait. Si elle voulait un gigolo pour la poursuivre, elle n’avait qu’à sourire à n’importe quel type qu’elle allait croiser en sortant, mais ça n’allait pas être lui.

- Pour vous c’est un jeu c’est ça ? Je dois jouer selon vos règles ? On sait très bien tous les deux que si c’est le cas, je suis voué à perdre.

S’il doit perdre, ça ne sert à rien. Il n’a pas envie de se sentir mal à cause de quelqu’un d’autre, il n’a pas envie d’être triste, de repartir dans la spirale. Il s’en est extirpé avec difficulté, il sait que c’est trop dangereux. Ce n’est pas qu’il va y repartir à cause d’une femme, mais une femme peut le faire douter de lui au point d’y retourner.

- Si je m’étais arrêté au physique, un bouquet de fleurs attendrait sagement de se faire jeter dans la poubelle de votre bureau. Votre physique n’a pas changé ces derniers temps, vous êtes toujours aussi belle. Si je suis votre raisonnement, à savoir que je ne suis intéressé que par votre plastique, je continuerais à vous offrir des fleurs. Si vous êtes là, c’est bien parce que j’ai arrêté de le faire.

Il n’était pas si idiot. Evidemment, la beauté légendaire de la jeune femme ne pouvait pas être ignorée, il ne pouvait pas dire le contraire. Elle lui plaisait physiquement, mais ce n’était qu’une des facettes, elle était loin de se résumer à seulement ça. En réalité, Bo Geom n’était pas totalement décidé à abandonner totalement la demoiselle, mais pour le moment, il avait besoin de s’en éloigner un peu. Raison pour laquelle ça l’agaçait qu’elle vienne le chercher dans un moment normalement si apaisant pour lui.

- Vous pensez réellement que je suis un crétin ? Que je n’ai aucun courage ? Même pas celui de venir vous offrir des fleurs en personne alors que vous avez la pire réputation de l’école ? Je suis peut-être un crétin mais je ne suis pas bête au point de continuer quelque chose qui ne mènera à rien. Vous n’êtes pas intéressée, je l’ai bien compris. Je ne vois pas pourquoi j’insisterais, si ce n’est pour gonfler votre ego. Vous n’avez pas besoin de moi pour ça.

Le jeune homme quitte la chanteuse des yeux pour se concentrer à nouveau sur son piano. Il a une réelle envie de lui dire d’aller se faire voir mais il est déjà dans un sacré pétrin. Elle ne va clairement pas apprécier qu’il se détourne d’elle, sa présence ici est bien la preuve qu’elle compte bien mener les choses comme elle l’entend.

- A moins que vous ne souhaitiez jouer un morceau avec moi, je vous invite à me laisser tranquille.

Toujours sans la regarder, le garçon pose de nouveau les doigts sur les touches noires et blanches pour en tirer une mélodie. Au fond, il ne voulait pas qu’elle s’en aille. Il voulait croire que si elle était là, ce n’était pas juste pour convaincre le pigeon qu’il était de continuer à la courtiser. Il voulait croire qu’elle avait un minimum d’intérêt pour lui. Aussi infime soit-il, s’il était existant, il ne pouvait pas l’ignorer.