Le silence régnait, seuls les bruits de pages qui se tournaient et les stylos qui glissaient sur les cahiers de faisaient entendre. Elizabeth était perdue dans son monde. Enfin, perdue, pas vraiment. Elle y était plongée. Et d'ailleurs, ce n'était pas son monde, mais celui d'un auteur qui le partageait à quiconque voulait bien ouvrir son œuvre. La bibliothèque était l'un des endroits favoris de la jeune fille. Elle pouvait y oublier, l'espace d'un instant, qui elle était et le lourd combat qu'elle menait jour après jour. Ça lui permettait aussi de côtoyer une partie de la population qu'elle devait protéger. De temps en temps, elle levait le nez de son livre avec un sourire.

Installée sur sa chaise, elle bougeait sans s'en rendre compte. Au bout de quelques secondes, elle finit par se rendre compte que ce qui la dérangeait, c'était la vibration de son téléphone dans sa poche. Elle ne le coupait généralement pas, au cas où il y ait une urgence à l’institut. Cependant, ce n’était pas l’institut mais seulement sa mère. Elle lut le message et fronça les sourcils. Ses parents avaient une surprise pour elle. Ce n’était pas dans leurs habitudes et sa mère avait l’air bien trop enthousiaste. Elle n’avait pas trop confiance mais après tout, qu’est-ce qu’elle risquait ? Elle referma son livre, le reposa à sa place et sortit en vitesse.

En chemin, elle vérifia l’adresse donnée dans le message. C’était à San Francisco. Ce n’était pas très loin alors elle se dépêcha un peu, histoire de ne pas être en retard. Arrivée sur place, elle vérifia une seconde fois pour être sûre de ne pas s’être trompée. Elle se trouvait devant une grande demeure qu’elle ne connaissait pas. Elle s’avança, toqua et fut surprise de voir la porte s’ouvrir immédiatement. Sa mère se trouvait derrière avec un grand sourire sur le visage, son père à quelques pas d’elle.

- Ma chérie ! Je suis heureuse de te voir. J’espère qu’on ne te dérange pas.
- Bonjour maman, bonjour papa. J’étais en train de lire, rien d’important. Qu’est-ce qu’il se passe ?

Si ses parents avaient eu une mission à lui donner, elle l’aurait demandé sur le même ton. Ils l’emmenèrent dans un grand salon… plein à craquer de gens et de… choses. Des fleurs, de la nourriture sur la table, des robes blanches dans un coin de la pièce. Certains attendaient sagement qu’on leur dise quelque chose, d’autres venaient déjà servir un thé à la demoiselle qui se brûla presque les mains en acceptant une tasse. Elle s’assit, de plus en plus méfiante.

- Toute question attend une réponse vous savez. Vous faites quoi là ? Vous avez acheté une maison ? Vous organisez un mariage ? Oh, vous renouvelez vos voeux peut-être ? Pourquoi on est pas à l’institut pour faire ça ? Vous êtes louches là.

Il ne fallait pas la prendre pour une idiote, quelque chose se passait. Sa mère, assise à côté d’elle, se rapprocha et posa une main sur son avant bras.

- Encore mieux que ça ma chérie ! On organise ton mariage ! Je te présente ton fiancé.

Un jeune homme de l’âge d’Elizabeth s’avança alors vers eux, un doux sourire sur le visage. Il s’inclina devant elle et Beth laissa tomber sa tasse sous la surprise. Elle savait qu’il était courant de faire des mariages d’intérêt, ses parents avaient d’ailleurs appris à s’aimer après quelques temps, mais elle n’avait pas pensé un instant que ça pouvait la concerner. Surtout qu’on lui présenterait le fiancé en question comme ça. Elle sentit la colère monter alors que quelqu’un vint ramasser les bouts de porcelaine brisés.

- Pardon ?! Mais quel mariage ? Je vous ai jamais dit que j’allais me marier.
- On sait ma chérie. Tu es trop occupée pour chercher quelqu’un, tu es toujours sur tes missions, avec cette Blackthorn, on se disait que ça te soulagerait qu’on prépare tout pour toi. On a fait venir les meilleurs ici ! Tu vas pouvoir choisir tes fleurs, ta musique, la décoration de la salle, la nourriture, les alliances, même ta robe de mariée ! On les a tous fait venir ici. C’est pas génial ?
- Non, c’est irrespectueux et moyenâgeux.

Blesser ses parents avec sa réponse ? Elle n’en avait que faire. Elle se leva, ignora le jeune homme qu’elle avait à peine regardé et s'apprêta à sortir. Finalement, elle fit demi-tour et entra dans la première pièce qu’elle trouva et qui n’était pas le salon. Des gens s’y trouvaient, avec des bijoux visiblement. La colère se fit encore plus importante en elle.

- Partez, le mariage est annulé.
- Mais madame…
- Ya pas de madame, déguerpissez.

Ce n’était pas juste de leur parler comme ça, ils n’y étaient pour rien mais elle était terriblement en colère. Comment ses parents avaient pu croire qu’il suffisait de lui dire ça pour qu’elle dise ok ? Ils se fourraient le doigt dans l’oeil. Elle changea de salle sans faire attention à quels professionnels s’y trouvaient et recommença à leur dire de partir. Finalement, elle tenta de faire toutes les pièces avant de retourner au salon.

- Allez, tout le monde s’en va. Vous serez payés pour aujourd’hui mais c’est plus la peine de compter sur ce mariage.

Certains partaient en silence, d’autres ne savaient pas trop quoi faire. La mère d’Elizabeth tentait en effet de les calmer et de leur dire que ce n’était qu’une colère passagère et que sa fille allait bientôt s’asseoir pour sagement faire ses choix. Plus qu’énervée de la voir ignorer son avis, elle s’adressa à l’une des jeunes femmes qui n’avait pas encore bougé.

- Je le dis en quelle langue ? Vous êtes bouchés tous autant que vous êtes ? PARTEZ !

Elle était à deux doigts de prendre la première chose qui lui passait sous la main pour le jeter sur ces gens -y compris ses parents- qui étaient là. Ils ne méritaient pas un tel traitement mais elle voyait rouge, incapable de se contrôler.